Contribuables suisses non déclarés : jusqu’au 30 septembre 2018 pour régulariser les comptes bancaires détenus en Europe

Auteur
Louise Bonadio, KBB Étude d’avocats, avocate et experte-fiscale diplômée
Thématique
Autre

Depuis le 1er janvier 2017, l’échange automatique de renseignements relatifs aux comptes financiers est en vigueur entre la Suisse et l’Union européenne notamment. D’après ces accords, les banques suisses transmettent des données sur leurs clients européens, et les banques européennes transmettent des données sur leurs clients résidants fiscaux en Suisse. Pour être précis, les banques collectent les données, puis les transmettent aux autorités fiscales locales, qui elles-mêmes les transmettront aux autorités fiscale suisses.

Concrètement, cela signifie que les autorités fiscales suisses auront en leur possession les détails de tous les comptes bancaires détenus à l’étranger par des contribuables suisses.

La liste des pays participant à l’échange automatique de renseignements croît de jour en jour. Pour l’Union européenne et quelques autres pays, l’échange est entré en vigueur le 1er janvier 2017. Pour d’autres, le 1er janvier 2018. La liste de l’ensemble des pays avec lesquels la Suisse applique l’échange automatique de renseignements ainsi que la date d’entrée en vigueur est disponible en ligne et constamment actualisée .

Pour les contribuables suisses qui n’auraient pas déclaré leurs comptes dans un des pays visés par l’échange automatique de renseignements, il faut s’attendre à des conséquences financières et pénales. En effet, pour un contribuable suisse, ne pas déclarer un compte bancaire détenu à l’étranger revient dans la presque totalité des cas à commettre une soustraction d’impôts. Précisons que se rend coupable de soustraction le contribuable qui, intentionnellement ou par négligence, fait en sorte qu’une taxation ne soit pas effectuée alors qu’elle devrait l’être, ou qu’une taxation entrée en force soit incomplète (articles 175 al. 1 LIFD et 56 LHID).

Tant au niveau fédéral que cantonal, la soustraction fiscale est une infraction punie d’une amende fixée en fonction de la faute et du montant de l’impôt éludé : elle peut aller du tiers au triple du montant soustrait. En plus de l’amende, le contribuable devra s’acquitter des impôts fédéraux, cantonaux et communaux éludés sur les 10 dernières années ainsi que des intérêts moratoires (fixés en fonction des années, aux alentours de 3% les dernières années).

Pour éviter la poursuite pénale, et donc l’amende, le contribuable indélicat a la possibilité de faire une déclaration spontanée. Il s’agit d’une repentance prévue depuis 2010 par la loi tant sur le plan fédéral que cantonal. Contre une pleine coopération et pour autant qu’il s’agisse de sa première déclaration spontanée, le contribuable obtient la levée des sanctions pénales et des amendes fiscales. Il reste toutefois débiteur des impôts éludés (sur 10 ans pour les impôts directs, 7 ans pour l’impôt anticipé et entre 5 et 7 ans pour la TVA) et des intérêts moratoires. Notons que les héritiers qui régularisent les avoirs non déclarés du défunt ne payent l’impôt éludé et les intérêts moratoires que sur 3 ans, au lieu de 10.

Les accords sur l’échange automatique de renseignements ont une influence directe sur le mécanisme de la déclaration spontanée : en effet, dès l’instant où l’autorité fiscale a connaissance du compte non déclaré, la déclaration n’est plus considérée comme spontanée et donc ne garantit plus au contribuable indélicat de profiter de la levée des sanctions pénales.

L’Administration fédérale des contributions a publié une prise de position par laquelle elle indique considérer que les éléments fiscaux faisant l’objet de l’échange automatique seront connus de l’administration au 30 septembre 2018 au plus tard.

Les contribuables visés par l’échange automatique d’information ont donc jusqu’au 30 septembre 2018 maximum pour se régulariser s’ils veulent échapper aux sanctions pénales. En partant naturellement du principe que l’autorité fiscale n’a pas connaissance des éléments non déclarés par d’autres sources d’ici là.

L’autorité précise qu’en ce qui concerne les éléments fiscaux soumis à l’échange automatique de renseignements qui prendront naissance après 2017, cette règle s’appliquera par analogie à compter du 30 septembre de l’année durant laquelle l’échange des renseignements concernés aura lieu pour la première fois. Il en va de même pour les pays pour lesquels l’accord est entré en vigueur le 1er janvier 2018 : on considère que les premières données seront connues le 30 septembre 2019 au plus tard.

Compte tenu de ce qui précède, il n’est pas étonnant d’apprendre que chez les autorités fiscales, l’entrée en vigueur des accords sur l’échange automatique s’est traduite par une hausse massive des dossiers de régularisation.

Notons que les biens immobiliers ne sont pas concernés par l’échange automatique de renseignements. En revanche, les autorités fiscales seront à même de constater si des taxes foncières locales ont été payées au débit d’un compte bancaire étranger non déclaré, leur permettant ainsi de retracer l’existence d’un éventuel bien immobilier détenu à l’étranger et non déclaré.

Les comptes bancaires fermés après le 1er janvier 2017 sont aussi concernés par l’échange automatique.

Pour se régulariser avant le 30 septembre 2018, chaque canton a sa propre procédure. Elle est simple dans la plupart des cas et de nombreux cantons ont prévu un formulaire spécifique à télécharger en ligne. Il faudra y joindre tous les justificatifs. L’impôt anticipé qui aurait éventuellement été payé ne peut plus être remboursé, mais les frais de gestion par exemple peuvent être déduits.